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Les publications sur le changement climatique en Afrique épinglent souvent l’impact négatif de l’élevage et ses importantes émissions de gaz à effet de serre. Si certains animaux d’élevage rejettent beaucoup de gaz à effet de serre, ce n’est pas une raison pour montrer du doigt l’ensemble du secteur. Les poulets ont peu d’impact sur l’environnement et une faible empreinte carbone. Des travaux de recherche sont en cours pour que les petits éleveurs africains puissent adopter des techniques de production avicole intelligentes face au climat.
Experts et décideurs, conscients des énormes défis du changement climatique et de la variabilité du climat pour le secteur de l’agriculture et de l’élevage, explorent de nouvelles approches permettant de faire face à l’impact du changement climatique et de contribuer à l’augmentation de la productivité ainsi qu’à la réduction des gaz à effet de serre. La production avicole à petite échelle remplit tous les critères d’une production intelligente face au climat, même si jusqu’à présent, ses avantages ont été occultés par la priorité donnée aux possibilités offertes par l’agriculture et aux défis de la conservation des sols et des ressources en eau dans le contexte de la gestion des bassins versants.
Les poulets sont l’espèce la plus fréquemment élevée dans les zones rurales d’Afrique subsaharienne. Ces animaux fournissent de précieux revenus aux ménages les plus pauvres, en particulier aux femmes et aux jeunes. Cet élevage se pratique facilement et permet de produire une viande et des œufs d’excellente qualité nutritive. L’empreinte des poulets sur l’environnement est en outre plus faible que celle de la plupart des autres animaux d’élevage. D’aucuns avancent que les poulets pourraient souffrir du changement climatique mais la capacité d’adaptation de nouvelles races, résistantes à ce phénomène, pourrait être améliorée.
Une productivité accrue
Les niveaux de production et de productivité des petits élevages de poulets d’Afrique subsaharienne sont toutefois généralement très faibles. Une poule ne produit en moyenne pas plus de 45 œufs par an ; il lui faut plus de six mois à un poulet pour atteindre son poids vif – qui ne dépasse jamais 1,5 kg. Dans les pays développés, une poule pond en revanche plus de 300 œufs par an, un poulet atteint en moins de 40 jours un poids de 2 kg. Le contraste est saisissant.
Ces derniers temps, la recherche se concentre de plus en plus sur l'amélioration de la productivité et de la capacité d’adaptation des espèces de poulet locales aux différents systèmes agro-écologiques et agricoles locaux. Le projet « African Chicken Genetic Gains » (ACCG) est l’une de ces initiatives de recherche. Ce projet quinquennal, mis en œuvre par l'Institut international de recherche sur l'élevage (ILRI), financé par la Fondation Bill et Melinda Gates, associe plusieurs partenaires et différents pays. Il a permis d’accroître la production à petite échelle ainsi que la productivité des petits élevages, l’objectif étant de sortir de la pauvreté les petits éleveurs et agriculteurs. Ce projet a par ailleurs servi de plateforme pour tester, élever et améliorer en permanence des poulets adaptés au climat des tropiques.
Des poulets « adaptés » au changement climatique
Le projet ACGG et ses partenaires ont enregistré des résultats encourageants lors des tests sur les races de poulet indigènes et exotiques, mais aussi en termes d’amélioration de l’accès des petits éleveurs à des souches plus productives, adaptées au contexte agroécologique de l’élevage et vaccinées. Les travaux d'innovation génétique ont tenu compte des préférences des éleveurs de différents contextes agroécologiques. Les souches mises à la disposition des éleveurs par le projet ont permis à plus de 6 000 ménages d’enregistrer des gains de productivité majeurs, tant en termes de poids vif (augmentation moyenne de 200 à 300 % par rapport aux souches indigènes) que de production d'œufs (gain moyen de 100 à 160 % par rapport aux souches indigènes). L'ACGG a ainsi démontré avec succès la viabilité de la recherche génétique innovante pour l’amélioration de la productivité des poulets d’élevage, l’idée étant aussi d’améliorer leur adaptation au changement climatique.
Il est donc grand temps que la recherche sur la productivité du poulet tienne compte de la nécessaire adaptation au changement climatique. De très nombreux éléments plaident en outre en faveur d’une meilleure prise en compte de la contribution au changement climatique des nombreuses pratiques de la filière de l’élevage avicole commercial et à petite échelle. Le discours sur la production intelligente face au climat doit également inclure ce sous-secteur. Nous pensons par ailleurs qu’un programme de recherche et d'action sur l’élevage de volaille pourrait encourager les projets avicoles, mis en œuvre en Afrique, à tenir compte de l’aspect d’adaptation, notamment la résistance aux fortes chaleurs et au froid. Il sera alors possible d’assurer la pérennité de ce secteur dans le contexte du changement climatique.
Cet article a été rédigé dans le cadre d’une initiative menée par le CTA visant à documenter et à partager les connaissances exploitables sur les approches agricoles efficaces pour l’agriculture des pays ACP. Il capitalise sur les connaissances, les enseignements et les expériences pratiques afin de documenter et d’orienter la mise en œuvre de projets axés sur l’agriculture pour le développement.