Blog
L’agriculture intelligente face au climat (AIC), qui comprend une série de techniques de production et d’intrants qui aident les agriculteurs à s’adapter aux modifications des conditions météorologiques, est promue dans le cadre de l’initiative climato-intelligente du CTA en Afrique australe, qui vise à renforcer la résilience au changement climatique et les revenus des agriculteurs.
Mary Mtonga est une agricultrice intelligente, et nous ne parlons pas ici uniquement de sa personnalité, mais aussi de la façon dont elle cultive ses champs et récolte ses cultures. Elle fait partie des 300 000 petits exploitants de cinq districts du Malawi formés aux pratiques et approches de l’agriculture intelligente face au climat (AIC). L’AIC, promue par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), augmente la productivité et les revenus et permet ainsi aux agriculteurs de limiter la progression de la faim face à la sécheresse, devenue la « nouvelle norme » en Afrique australe.
Mme Mtonga, qui plante ses semences dans des trous remplis de résidus de culture et de fumier, pratique ainsi l’agriculture de conservation, l’une des nombreuses approches promues par l’AIC.
« Notre projet aide les agriculteurs à s’adapter aux températures élevées et à l’augmentation des sécheresses et des inondations résultant du changement climatique, et ce, à travers la culture de variétés résistantes aux sécheresses et la diversification de leurs activités grâce à l’élevage, explique Mariam Kadzamira, chargée du changement climatique au CTA. A cause du changement climatique, les agriculteurs ont dû modifier la façon dont ils cultivent leurs terres pour pouvoir produire des denrées alimentaires et s’assurer des revenus de manière durable. L’AIC propose des solutions validées, à diffuser plus largement auprès des agriculteurs. L'évaluation du projet nous a permis de faire le point sur l’efficacité des solutions d’AIC pour les agriculteurs d'Afrique australe et a révélé la nécessité de davantage de sensibilisation, de formations et de partage de connaissances sur les approches d’AIC, ainsi que d’un partenariat innovant pour la mise à l’échelle de ces techniques. »
Un changement intelligent
En 2013, Mary Mtonga a constaté une chute du rendement de ses cultures de maïs et de la fertilité du sol de sa parcelle de 8 ha dans le district de Mzimba, au nord du Malawi. En conséquence, elle s’est lancée dans l’agriculture de conservation. « Je m’en sors bien car je pratique l’agriculture de conservation », explique la membre de la Champira Farmers Association, affiliée à la National Smallholder Farmers Association of Malawi, qui représente 130 000 petits exploitants. J’ai pris conscience des avantages de ce type d’agriculture. Quand j’ai commencé, je récoltais 15 sacs de 50 kg de maïs ; désormais, j’en récolte 40. Je cultive aussi des pois d’Angole et des arachides pour le commerce ; j’ai adopté des variétés de maïs résistantes à la sécheresse. Mes rendements ont augmenté, mes revenus aussi. »
Les cultures intercalaires, une solution intelligente
« La diversification est cruciale dans les interventions d’AIC », affirme Joyce Mulila-Miti, scientifique spécialiste de la production et de la protection végétales. Elle explique que le maïs résistant à la sécheresse ne devrait pas être cultivé seul. « L’AIC soutient la résilience des agriculteurs car ses innovations et interventions, comme les cultures intercalaires et l’utilisation de semences résistantes à la sécheresse, répondent aux changements de conditions météorologiques auxquels les agriculteurs de la région sont confrontés. »
« La diversification fonctionne comme une assurance pour les petits exploitants », indique Paxie Chirwa, professeur de science forestière à l’université de Pretoria, en Afrique du Sud. « L’AIC s’applique aussi à l’exploitation forestière. Les agriculteurs dépendent d’un système alimentaire intégré, qui tient compte également de l’utilisation du bois et de la demande d’énergie. Nous ne pouvons pas dissocier les arbres des autres cultures. »
« Nous devons miser sur la sensibilisation car la plupart des interventions d’AIC prennent du temps. Ce ne sont pas des approches dont on récolte immédiatement les fruits », prévient Mme Mulila-Miti, qui recommande de cibler spécifiquement les agriculteurs déjà impliqués dans des pratiques climato-intelligentes, comme l’agroforesterie. Pearson Chiutsi, un petit exploitant qui cultive du maïs, des arachides et du soja ainsi que des arbres sur sa parcelle au centre du Malawi, affirme que l’agroforesterie a amélioré ses rendements tout en garantissant la sécurité alimentaire et énergétique de sa famille.
La connaissance est la clé
« Bien qu’ils soient régulièrement confrontés aux impacts du changement climatique, les agriculteurs ne sont pas conscients de toutes les solutions d’AIC disponibles, et les informations qu’ils reçoivent ne sont pas adaptées », explique Joram Nkhokwe, directeur du département du changement climatique et des services météorologiques au Malawi. Il s’interroge : « Alors que les informations météorologiques sont cruciales pour les exploitants agricoles, les interprètent-ils correctement et efficacement ? Il serait judicieux d’améliorer la fourniture de ces informations, afin que les agriculteurs puissent adopter des pratiques agricoles intelligentes plus rapidement et plus efficacement. Nous avons pris conscience de cette lacune et sommes en train de mettre en place des clubs d’information météorologique, appelés “Zanyengo community clubs”. Ceux-ci organiseront des réunions régulières lors desquelles les agriculteurs recevront et partageront des informations météorologiques, et en discuteront, afin de prendre des décisions agricoles éclairées. »
Au Malawi, en Zambie et au Zimbabwe, des agriculteurs reçoivent des informations météorologiques sur leur téléphone portable au titre du projet régional sur l’AIC du CTA. En outre, le projet, qui entend atteindre 200 000 petits exploitants d’ici février 2020, promeut l’utilisation de semences résistantes à la sécheresse et les assurances basées sur un indice climatique dans le cadre des interventions d’AIC.