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De nombreuses innovations en matière d’agriculture intelligente face au climat (AIC) ont été développées pour aider les agriculteurs à atteindre le triple objectif de l’adaptation au changement climatique, du renforcement de la productivité et, si possible, de la réduction des émissions. Les enseignements tirés par des projets d'AIC dans trois pays soulignent à quel point le développement de valeur partagée entre les partenaires contribue à l’élargissement de l’AIC.
L’agriculture intelligente face au climat a différentes significations selon les acteurs. Les parties intéressées par l’AIC vont des agriculteurs, qui souhaitent s’assurer d’une production minimale en cas d’aléas climatiques, au secteur privé, qui considère l’AIC comme un moyen d’élargir ses activités, d’augmenter ses bénéfices ou encore d’assurer un flux constant de matières premières agricoles pour rentabiliser ses machines. Les décideurs politiques sont également concernés, puisqu’ils peuvent chercher des options pour atteindre leurs objectifs de politique agricole et réaliser leur programme de développement malgré l’imprévisibilité de la météo.
Un projet mené par le CTA, Déployer à plus grande échelle des solutions d’agriculture intelligente face au climat pour les agriculteurs et les éleveurs d’Afrique australe, vise à améliorer la sécurité alimentaire et les revenus des agriculteurs du Malawi, de Zambie et du Zimbabwe face aux aléas climatiques. Durant les phases de conception et d’élargissement de l’initiative, les partenaires ont cherché à éviter un écueil courant : le manque de durabilité associé au financement des bailleurs. Le secteur privé a pour ce faire été impliqué dès les prémices du projet.
Etant donné les divers intérêts en jeu, avant de déployer le projet sur le terrain, le CTA a consulté différents acteurs de la région via un forum climatique visant à passer en revue le concept, la motivation et les objectifs du projet. L’idée était d’écouter les différentes parties prenantes et de modifier si nécessaire les approches de mise en œuvre prévues.
Présélectionner des solutions d’AIC
Plusieurs solutions d’AIC ont été évaluées, mais le choix final a reposé sur leur capacité à générer de la valeur partagée pour les acteurs clés. Les facteurs pris en compte incluaient la pertinence des solutions par rapport aux besoins des agriculteurs, la réponse à la demande du marché, la conformité avec les priorités gouvernementales et les cadres politiques, ainsi que le potentiel de co-investissement et de mobilisation du secteur privé. La possibilité de réaliser des économies d’échelle tout en soutenant l’AIC a aussi été prise en compte. Le choix des sites de projet a été déterminé conjointement avec le groupe d’acteurs, sur la base d’informations à propos d’initiatives similaires en cours ou passées, des enseignements tirés et de la capacité à en tirer profit et à créer suffisamment de valeur partagée.
Dans chaque pays, des modèles de partenariats multi-acteurs ont été élaborés pour soutenir la mise à l’échelle de l’AIC. Les partenaires ciblés étaient des fournisseurs privés de données météorologiques, des compagnies d’assurance et des opérateurs de téléphonie mobile. Des agences gouvernementales de vulgarisation agricole (y compris des services d’information agricole) et météorologiques ont aussi été impliquées.
- En Zambie, un modèle de partenariat à trois parties a été établi, impliquant un institut de la connaissance spécialisé dans l’utilisation des TIC pour l’apprentissage ouvert et à distance pour adultes, une compagnie d’assurance privée et une ONG de développement rural.
- Au Zimbabwe, un modèle de partenariat à deux parties a été formé, réunissant l’organisation paysanne locale et une entreprise privée d’assurance/téléphonie mobile.
- Au Malawi, le partenariat est de facto unilatéral, puisque l’organisation paysanne locale était la seule agence de mise en œuvre.
Favoriser la durabilité
On observe que chacun des partenaires s’intéresse à l’AIC pour différentes raisons, mais aussi en fonction de son niveau d’adhésion à la valeur partagée entre les acteurs. La valeur partagée les encourage à s’influencer mutuellement et à faire profiter de leur avantage comparatif au partenariat, en vue d’atteindre les objectifs du projet.
Le secteur privé fournit des informations sur la segmentation du marché et le ciblage des bénéficiaires potentiels pour définir le potentiel commercial. Les entreprises privées impliquées ont, par exemple, pu et ainsi identifier les cibles du projet. En retour, elles ont amélioré la pénétration du marché de leurs produits.
Les organisations paysannes ont assuré l’accès aux bases de données et informations sur les agriculteurs, permettant ainsi au secteur privé d’atteindre un marché plus large. Les agences gouvernementales ont bénéficié des activités de renforcement des capacités organisées par le projet, ainsi que de ses contributions à leur objectif d’élaborer des approches robustes en matière de sécurité alimentaire dans le contexte de l’incertitude climatique. Les négociants en produits agricoles ont quant à eux identifié des possibilités sur le marché pour des activités en lien avec l’AIC, étant donné la hausse des commandes de semences résistantes à la sécheresse de la part des agriculteurs.
Les principaux messages tirés de cette expérience sont :
- Le capital financier et technologique du secteur privé doit être mobilisé pour compléter le soutien des bailleurs et d’autres acteurs du secteur public, en vue de mettre à l’échelle les solutions d’agriculture intelligente face au climat.
- Les initiatives d’AIC doivent avoir du sens pour tous les partenaires, afin de préserver l’intérêt des partenaires et de favoriser leur implication active.
- Les partenariats durables visant à élargir l’AIC doivent être clairement définis et générer des bénéfices pour tous les partenaires.
La transparence, la confiance et la prise de décision conjointe contribuent à des partenariats robustes et dynamiques.
Cet article a été rédigé dans le cadre d’une initiative menée par le CTA visant à documenter et à partager les connaissances exploitables sur les approches agricoles efficaces pour l’agriculture des pays ACP. Il capitalise sur les connaissances, les enseignements et les expériences pratiques afin de documenter et d’orienter la mise en œuvre de projets axés sur l’agriculture pour le développement.